Adoptée par le Sénat en janvier 2025, la proposition de loi portée par le sénateur Laurent Duplomb — agriculteur de profession et ancien président de la FNSEA — prétend simplifier les contraintes pesant sur les agriculteurs. Mais derrière cette promesse de “simplification”, de nombreuses voix, dont celle du CPNS (Comité pour la Protection de la Nature et des Sites), alertent sur les dangers environnementaux et sanitaires que recèle ce texte.
Une loi aux effets controversés
Soutenue par certains syndicats agricoles majoritaires, cette proposition de loi facilite notamment l’extension des élevages intensifs, déjà largement critiqués pour leur impact sur l’environnement et le bien-être animal. Elle encourage également la mise en place de mégabassines, infrastructures de stockage d’eau controversées, en simplifiant les procédures de dérogation aux règles de protection des espèces menacées.
Autre point particulièrement critiqué : l’affaiblissement de la protection des zones humides, pourtant essentielles à la régulation du climat, à la lutte contre les inondations et les sécheresses, et à la préservation de la biodiversité. La loi prévoit également de réintroduire l’usage de l’acétamipride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France depuis 2018 en raison de ses effets nocifs sur les pollinisateurs et la santé humaine.
Enfin, en favorisant indirectement le retour des pesticides dans les pratiques agricoles, la loi va à rebours des recommandations scientifiques sur la santé publique et la protection des écosystèmes.
Un texte en décalage avec les défis agricoles
Pour ses opposants, cette proposition de loi passe à côté des véritables enjeux du monde agricole : précarité des revenus, dépendance économique, manque d’accompagnement vers la transition agroécologique. Plutôt que de soutenir une agriculture résiliente, durable et respectueuse de l’environnement, elle renforcerait un modèle productiviste aux conséquences désastreuses sur le long terme.
« En opposant certains agricultures industriels et écologie, cette loi compromet à la fois notre santé et nos capacités de production futures », résume un représentant de France Nature Environnement (FNE).
Une adoption sans débat
Le 26 mai 2025, les députés ont voté une motion de rejet du texte. Un paradoxe apparent : cette motion visait en réalité à contourner un débat parlementaire de fond, rendu particulièrement difficile par les quelque 3 500 amendements déposés depuis le passage du texte au Sénat. L’objectif ? Gagner du temps pour permettre une adoption discrète du texte en septembre 2025, via une commission mixte paritaire (7 députés, 7 sénateurs).
Résultat : l’absence de débat prive les citoyens d’un réel échange démocratique sur un texte qui pourrait avoir des conséquences majeures sur l’environnement, la santé publique et l’avenir de notre agriculture.
Le prix à payer
En refusant d’aborder en profondeur les effets à long terme de cette loi, le législateur risque de faire payer deux fois les citoyens : d’abord par les conséquences directes des atteintes à l’environnement, ensuite par les coûts publics liés à l’atténuation de ces effets — qu’il s’agisse de la dépollution de l’eau, du traitement de maladies chroniques ou de la perte de biodiversité.