Richement documenté, l’ouvrage de Jean-Marc Viaud et Gaston Godard nous ramène quelques années en arrière, à cette époque mouvementée où la royauté s’inclinait devant la révolution en marche.
Comment résister à ce titre accrocheur et surprenant ! Très vite la lecture agréable de cet ouvrage, co-écrit par Jean Marc Viaud et Gaston Godard, tous deux géologues, sérieusement documenté et rédigé d’une plume alerte, nous fait voyager à travers une époque d’une grande richesse évènementielle, à la découverte d’un personnage peu commun qui aimait beaucoup voyager à une époque où les conditions de déplacement étaient imprévisibles et présentaient des risques, un voyage au plus profond d’un continent qui surprend encore, et que l’actualité rapproche de notre quotidien à plus d’un titre. Un voyage captivant pour découvrir l’œuvre d’un pionnier à plus d’un titre de la géologie moderne.
Richement documenté, l’ouvrage de Jean-Marc Viaud et Gaston Godard nous ramène quelques années en arrière, à cette époque mouvementée où la royauté s’inclinait devant la révolution en marche. Avec beaucoup de talent l’auteur nous décrit les strates d’une lignée familiale qui a su rester toujours proche d’une société du XIXe siècle entreprenante et avide d’espaces nouveaux et de développements pour une industrie ambitieuse.
Si Léon Pervinquière devient géologue, c’est sans doute par accident ; en 1893 il utilisait les heures disponibles d’une période de son service militaire pour tenter d’expliquer l’origine de la butte coquillière de Saint-Michel-en-l’Herm ; comme bon nombre il se trompe sur l’origine de cette curiosité somme toute très banale, mais en 1897 il passe un doctorat de géologie à la Sorbonne, poursuit ses recherches en Tunisie qui est devenue récemment un protectorat français, et s’impose comme un spécialiste du crétacé et des ‘ammonites’. Parallèlement à ses activités d’enseignement, Léon poursuit ses recherches géologiques et collabore aux ‘levers’ de la carte géologique de la France, notamment de la Charente-Inférieure qu’il sillonne de 1905 à 1910 ; il ne délaisse pas pour autant l’extrême sud tunisien, une contrée désertique encore mal connue sinon par quelques courageux militaires et aventuriers intrépides, qu’il explore au-delà des ‘chotts’, à la recherche des gisements de phosphate recherchés pour la fabrication d’engrais.
L’apothéose de ces pérégrinations dans le désert tunisien sera l’exploration de la Tripolitaine au printemps1911 ; le héros rejoint officiellement une mission de bornage chargée de délimiter les frontières désertiques de la France opposée à l’ancien occupant qui était la Turquie, un voyage qui entraîne ces spécialistes jusqu’à Ghadames, la cité mystérieuse dont la prospérité perdue a reposé jadis sur les échanges transsahariens et le trafic d’esclaves. Léon Pervinquière est chargé d’évaluer le potentiel minier et hydraulique de la région, ce sera une énorme déception : en fait de richesses, l’extrême sud tunisien recèle un peu de calcite, beaucoup de sel et de gypse, mais pas le nitrate tant espéré.
Léon Pervinquière se distingue par une œuvre de vulgarisation scientifique abondante, surtout si on la ramène à la brièveté de sa vie ; son nom est resté attaché longtemps à certains fossiles, les ‘ammonites’ du ‘Crétacé’ dont il est un spécialiste et que l’ouvrage de JM Viaud et G Godard reproduit abondamment. Léon Pinverquière s’est appuyé sur l’étude des fossiles pour déterminer l’âge et la succession stratigraphique des terrains sédimentaires. A ce titre ses contemporains, et plus tard ses successeurs, lui attribuent un rôle pionnier dans l’étude stratigraphique des terrains de l’ère secondaire qui couvrent la plus grande partie de la Tunisie.
Plus qu’une biographie, l’ouvrage présent est une véritable étude sociologique, enrichie de digressions fort intéressantes, habilement insérées pour éclairer la vie trop courte d’un personnage fort apprécié ; ces récits parallèles sont autant d’indications précieuses de l’époque où il vécut, et bien au delà de cette époque. Un livre passionnant, une invite au voyage intelligent. « de la vendée au sahara, l’aventure tunisienne du géologue Léon Pervinquière (1873-1913) » par JM Viaud et G Godard, Ed. du CVRH.